4 janvier 2017 - Julia - Correspondances 2016-2018

Tiss ma Journée Internationale des Migrants !

Je quitte ma patrie et je laisse ma vie comme dette
Je fuis… et ma mère me suit.
Ma mère me dit :
Ma dette, ma dette,
Mon lait, mon lait,
Mes nuits, mes nuits, éveillées,
Te suivront.

Taha Abou-Alatahia, « tragédie d’un réfugié »

Le 17 décembre dernier, Le Tamis a participé à la semaine d’action organisée dans le cadre de la Journée internationale des migrants. Cette commémoration, décrétée par les Nations Unies puis réinvestie par la société civile, était animée sur Marseille par un ensemble d’associations et de collectifs, réunis sous la bannière réseau hospitalité. Cette année, l’idée portée par ce réseau était de focaliser les actions proposées sur les notions de solidarité et d’hospitalité, de valoriser les expériences positives de l’accueil, d’interroger les projections de l’ici et de l’après.

C’est devant la place de la Préfecture que Le Tamis, avec son atelier Tiss-me, a invité les passant.e.s à marquer leurs parcours au fil de laine. Dans ce jeu/performance les participant.e.s simulent un départ soudain de leur foyer pour atteindre un nouveau chez soi : le rêve doré.

Réalité augmentée

L’atelier Tiss-me, rappelons-le, s’inscrit dans le projet plus large des Chevauchées, dont l’objet est « d’explorer ensemble nos imaginaires collectifs ». La première série d’ateliers de ce projet se focalise sur le thème des migrations. L’idée de Tiss-me est donc moins de mettre les joueur/se.s face aux réalités vécues par les migrants que de faire ressortir les manières dont on se les représente. Ici, on ne cherche pas à distinguer le vrai du faux. On cherche à faire se rencontrer des images, des projections, des idées, des mots, des couleurs et des récits associés aux idées que l’on se fait d’un parcours migratoire.

Objets

Le scénario proposé est le suivant : la ville s’effondre et il faut la quitter en urgence. Les passagers qui embarquent pour Tiss-me doivent réfléchir à trois objets, seuls témoins de leur passé, seuls compagnons de voyage : un objet souvenir, un objet utile pour le futur et un objet secret.

Chaque voyageur/se se raconte une histoire différente. Le choix du bon objet tourmente. D’abord, on fait appel à son sens pratique, en choisissant de prendre avec soi un téléphone, une carte bleue ou encore un couteau suisse – objet aux choix multiples révélateur de l’indécis.e. Puis le spectre de la nostalgie nous rattrape et l’on glisse dans son sac un peu d’amour, un frère, un été à Marseille ou encore un objet transitionnel tel qu’une boîte ou un doudou, pour palier le chagrin lié au départ contraint. Les plus courageux se donnent de la force en remplissant leurs poches d’objets aux supers pouvoirs. Ainsi nous voyons défiler au fil de l’eau un casque de réalité virtuelle, un nuage, de la lumière, des traitements médicaux pour tous ou encore un coquillage, pour écouter et réécouter le rivage que l’on quitte.

Du clownesque…

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Cette traversée individuelle projette les joueur/se.s dans un univers farfelu dans lequel  on est balloté d’une frontière à l’autre, expérimentant les contrôles à répétition, l’attente, la suspicion et l’assimilation de pratiques culturelles jusqu’alors inconnues. Des personnages burlesques, animés par des acteurs dotés d’un imaginaire loufoque, nous font passer d’une dimension à l’autre sans que l’on comprenne comment on en est arrivé là…

Sur la côte depuis laquelle le voyage s’amorce, des pirates semblant sortis d’un rêve étrange alpaguent les passants qui arpentent les rues machinalement, au sortir de leurs courses de noël. Une fois embarqués dans le circuit, les joueur/se.s sont interceptés par des fonctionnaires surréalistes qui légitiment leurs pratiques incongrues en se targuant de supposées compétences médicales. Après s’être fait mesurer le nez, avoir réussi l’impitoyable examen d’équilibre de la noix de coco et éventuellement reçu une injection, les patient.e.s sont autorisés par ces médecins autoproclamés à reprendre la route.

Puis commence un face-à-face avec des guichetières d’une galaxie lointaine qui se revendiquent d’une administration volante non identifiée. Celles-ci nous convient à un temps d’introspection, nous soumettant à un interrogatoire déroutant sur les causes de notre migration, nos attentes sur la destination finale et les conditions d’accueil que nous y trouverons.

Il ne reste plus qu’à se mettre les policiers dans la poche et l’on accède enfin au rêve doré ! En effet, le parcours de migration se termine dans ce théâtre coloré où l’on se laisse bercer par des scènes oniriques. Lectures de poèmes en français et en arabe, mises en corps par un jeu de marionnette happent les regards et captent les oreilles attentives.

… Et du sérieux

Les interviews menées par les guichetières de l’administration volante non identifiée amènent les passant.e.s à repenser la notion d’hospitalité. Dans cette troisième étape du jeu, les joueur/se.s se recentrent et tentent d’imaginer les attentes et les craintes engendrées par l’accueil de migrant.e.s, tant pour celui qui reçoit que pour celui qui arrive.

C’est l’envie que j’ai dans mon cœur d’aller voir ce qu’il se passe ailleurs qui m’a envoyé !

A la question de savoir s’il existe des raisons plus légitimes que d’autres d’entreprendre une migration, deux causes semblent ressortir. Alors que certains joueur/se.s mettent en scène le drame, la nécessité de partir, d’autres invoquent la simple curiosité, l’envie de découvrir, d’aller vivre dans un autre pays comme un « droit universel ».

Accueillir, ça veut dire autoriser quelqu’un à exister quand il arrive.

Que veut dire pour vous le mot « accueillir » ?  C’est majoritairement l’idée de volonté qui ressort, le principe selon lequel les personnes qui accueillent doivent le faire avec plaisir, bienveillance, et non par charité. Également la notion de partage est prégnante : accueillir, c’est prendre le temps d’échanger. Ensuite, l’idée d’accepter l’autre, de prendre la personne comme elle est, et de lui donner les moyens de rester elle-même. Enfin, certain.e.s se demandent si la notion d’accueil ne cache pas une violence symbolique, mettant une distance avec un « autre » que l’on autorise à venir « chez soi ».

Changer ses habitudes, oui, sa personne, non.

Comment incorporer de nouvelles mœurs sans oublier qui l’on est ? Voilà une interrogation qui revient à plusieurs reprises dans la réflexion autour du mot « intégration ». Faut-il changer ses habitudes lorsque l’on arrive quelque part, et si oui, lesquelles ? Pour quelques personnes, l’intégration n’est pas tant l’affaire de celui qui arrive que de celui qui reçoit. Elles insistent sur l’importance d’une acceptation mutuelle, considérant le/la voyageur/se comme allant à la rencontre d’une culture en mouvement.

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Remerciements à Annalisa Lollo, Laura Spica, Mikaëla Le Meur, Sarah Limorté, Sofia Tierno, Irene Lentini, Taha Abou-Alatahia, Béatrice Guyot, Marien Guillé, Ulysse Ménard, Arnaud Chary, Farhana Hosen et Julia Henin qui ont animé le jeu avec entrain et imagination.

 

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5 décembre 2016 - Ulysse - Chroniques sur le guidon

Un Atelier très relevé !

Déclic : Petit mécanisme de déclenchement qui, actionné, détermine le fonctionnement ou l’arrêt d’un appareil. Faire jouer un déclic. (CNRTL)

Vendredi 18 novembre, Centre Régional d’Information Jeunesse Provence-Alpes, Marseille Canebière. Le décor est planté pour un atelier Déclic’ organisé par le RadioLab, le labo-média intergalactique de Radio Grenouille destiné à mettre en réseau des médias jeunes et étudiants de la région. Invité à venir exposer un projet de média, le Tamis a répondu présent à l’appel et s’est rendu sur place pour profiter de l’avis de « personnes ressources » triées sur le volet, dont l’expérience dans l’animation et la gestion de médias écrits, filmés ou encore sonores n’est plus à démontrer.

Présentation Dynam'hit

Un projet sur la comète ?

Si le Tamis n’est pas à proprement parler un média et que le collectif met en question les limites de la « jeunesse », tant d’un point de vue conceptuel qu’empirique (nous tentons encore de compter nos cheveux blancs), l’atelier Déclic’ s’est révélé être un excellent espace pour tester un projet un peu particulier. Il s’agit d’une plateforme multimédia interactive, conçue comme matrice de réalisation et support de valorisation des Chevauchées de nos imaginaires collectifs, dont le premier volet est placé sous le signe des Correspondances. Cette plateforme, inspirée par la narration « transmédia » (web-documentaires etc.), proposerait au téléchargement des ateliers (ou expériences), créant la possibilité, pour les participants, de produire et de mettre en ligne des contenus multiformes fédérés par une thématique commune. La plateforme verrait ainsi se constituer une enquête multi-située sur nos imaginaires collectifs et proposerait aux visiteurs la restitution au long-cours des résultats construits par les participants. Projet sur la comète ? Ptet ben qu’oui, ptet ben qu’non !

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L’atelier Déclic’ auquel nous avons participé nous a permis de mettre à plat les enjeux de ce projet ambitieux et stimulant, d’en dresser quelques lignes de fuite et d’esquisser des réponses aux grandes questions que la mise en place d’une telle plateforme pose.

Déroulement

Les ateliers Déclic’ sont avant tout des rencontres entre des porteurs de projets et des personnes ressources pour les guider sur des problématiques rencontrées au fil de l’eau. L’enjeu de ces ateliers, au-delà de trouver des solutions concrètes à des difficultés, est de créer des passerelles entre professionnels et novices en matière de médias. La transmission et le partage des expériences est une démarche qui fait écho aux principes du Tamis aussi deux de ses membres se sont rendus sur place avec entrain, animés par un sentiment de curiosité et d’excitation lié à l’inédit de l’aventure.

Après une courte introduction et quelques exercices pour briser la glace résiduelle entre les participants, les duos projets/ressources se sont formés pour entamer les discussions. Le Tamis a eu la chance de travailler avec Benoît Ferrier, directeur chez Tabasco Vidéo, une association de développement de projets audiovisuels installée dans le quartier de la Joliette. Après avoir fait connaissance, évoqué ce qui nous meut, raconté des bribes de nos histoires,Benoît nous a présenté des projets développés par Tabasco Vidéo et ses partenaires. Ces projets combinant art et sciences sociales, enquête et restitution, expériences sensibles et voyages connectées, se sont révélés très ressemblants à celui de la plateforme des Chevauchées. Et puisque les premiers existent bel et bien, ils ont rendu le dernier possible, évident et presque tangible. Nous retenons entre autres le Fatch, un journal transmédia qui n’en est pas moins qu’à son huitième numéro, mais aussi des balades authentiques et connectées : les Héros de Marseille.

Une belle affaire !

L’idée d’un média participatif est restée au cœur de la discussion entre le Tamis et Tabasco Vidéo pour finalement aboutir à une ébauche de plan de la plateforme multimédia des Chevauchées. Sans se laisser endormir, Benoît Ferrier a écouté nos paroles, nos envolées sur les Chevauchées et a pris notre projet au sérieux tout en acceptant sa part d’imaginaire. Il nous a apporté du grain à moudre et nous avons pu, ensemble, étudier sa faisabilité (recrutements, formations, subventions). Le Tamis a ainsi eu l’opportunité de discuter des limites et des dangers que représente un grand projet pour une petite structure, sans détruire le désir de le mener à bien. Chapeau bas pour Benoît !

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Le Tamis remercie aussi RadioLab pour l’invitation à cet atelier Déclic’ ainsi que tous les participants dont nous avons soigneusement recueilli tous les avis et commentaires. Nous espérons que cet atelier, une grande première, aboutira à d’autres projets collaboratifs stimulants.

Mikaëla Le Meur & Ulysse Ménard.

15 novembre 2016 - L'équipe - Les plis

Le premier pli ! Novembre 2016

Voici notre premier pli !

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15 novembre 2016 - Julia - Chroniques sur le guidon

En quête d’identités Méditerranéennes

« Ce n’est pas parce que les identités-relations sont ouvertes qu’elles ne sont pas enracinées. Mais la racine n’est plus une fiche, elle ne tue plus autour d’elle, elle trace, à la rencontre d’autres racines avec qui elle partage le suc de la terre.» (E. Glissant)

racines

Depuis mai 2016, l’association coopérative Le Tamis se charge de la coordination du projet Identités Méditerranéennes. Ce projet, dont le sous-titre est « Respect des identités multiples dans l’espace public Méditerranéen : regards croisés Nord-Sud sur le sexisme et le racisme », a été lancé en 2014 par le Laboratoire d’Idées Bureau d’Etude Recherche – LIBER – Prospective et Coopération.

Situé entre Marseille et Casablanca, le projet vise à créer des passerelles entre des acteurs aux parcours et bagages contrastés sur chacun des deux territoires et entre les deux rives de la Méditerranée. L’enjeu est de permettre à des lycéens et des étudiants de s’approprier les outils du débat et de la réflexion, en leur proposant, durant une année, de participer à un cycle de sensibilisations et d’actions concernant l’impact des discriminations racistes et sexistes sur la construction d’une citoyenneté méditerranéenne et d’un espace public commun. À travers des regards croisés, ils appréhendent la façon dont les identités individuelles se construisent par empilement et par appartenances à des sphères qui varient tout au long de leur parcours de vie.
« Vous sentez-vous Méditerranéen ? »

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Projection de documentaire à la Villa Méditerranée

Dans leur documentaire « En quête d’Identités Méditerranéennes », les lycéens de la classe de 2nde 1 du lycée Artaud (13013), en collaboration avec l’association Les têtes de l’art, ont parcouru les rues de Marseille, caméra au poing, interrogeant plusieurs interlocuteurs sur leurs perceptions de la notion d’identité en Méditerranée. Du conservateur du Musée d’histoire de Marseille, à la vendeuse de poisson sur le Vieux-Port, en passant par les élèves eux-mêmes, les témoignages ont été recueillis sur les questions identitaires en Méditerranée. « Avant, quand on me disait Méditerranée, je pensais à la mer, au soleil… je pensais pas aux autres villes » confie l’une des jeunes filles.

« Tous différents ? »

De leurs côté, les étudiant.e.s du Master L.E.A d’Aix-en-Provence, ont mobilisé des adolescent.e.s de la cité Airbel (13011) en collaboration avec l’association AFEV, ainsi qu’une classe de CE1 de l’école Jean Moulin II à Sénas (13560). Le cycle de sensibilisation et de réflexions, axé sur les discriminations, s’est étalé sur plusieurs mois et a donné lieu à la réalisation du documentaire « Tous Méditerriens ».

« Mon appartenance physique me joue des tours. Mon appartenance ethnique me joue des tours. Mon appartenance religieuse me joue des tours. Suis-je condamnée pour toujours ? ». C’est à l’occasion d’un concours de poèmes, proposé par l’AFEV que des participantes inspirées ont écrit plusieurs textes exprimant leurs ressentis au sujet des discriminations sexistes et racistes dont elles font l’expérience banale et quotidienne. Arrangés et mis en musique, ces textes ont été rappés lors d’un évènement organisé par les étudiant.e.s du Master L.E.A à la Villa Méditerranée le 25 juin dernier.

Regards croisés Nord-Sud

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Le projet s’étend de l’autre côté de la Méditerranée où les bénévoles de l’association Initiative Urbaine impulsent des actions. Cette association de quartier, implantée dans la commune de Hay Mohammedi, à Casablanca, offre aux jeunes un espace d’épanouissement personnel, de soutien scolaire et d’expression citoyenne. Les collégiens s’y rendent pour suivre des cours de soutien scolaire, puis les années passant, ils deviennent volontaires et finissent à leur tour par donner la classe pour leurs cadets. Se saisissant depuis quelques semaines seulement du projet Identités Méditerranéennes, l’association est actuellement en train de mettre au point des opérations visant à interroger les impacts des discriminations sexistes et racistes dans leur quartier et dans leur ville. Micros-trottoirs, tables rondes et concours de slam, entre autres initiatives, seront bientôt à l’œuvre dans les rues de Casablanca.

Semaine de la Solidarité Internationale

À Marseille, Le Tamis organise cette semaine, dans le cadre de la Semaine de la Solidarité Internationale, des ateliers portant sur l’identité. En lien avec les Chevauchées du Tamis, ces ateliers invitent à explorer collectivement les imaginaires sociaux et à analyser les formes d’interactions entre les savoirs et l’imaginaire mobilisé. Ces mercredi 16 et jeudi 17 novembre 2016, deux intervenantes artistes et anthropologues, Annalisa Lollo et Laura Spica mèneront auprès d’un groupe de jeunes résident.e.s du foyer de jeunes travailleurs AAJT son atelier Muse-Me. Conçu comme un atelier de création artistique, il invite les participants à réaliser des portraits croisés, grâce à des collages faits à partir de matériaux divers. La superposition des images et motifs évoque la construction de l’identité à travers le temps et l’espace. Le groupe de participants se compose essentiellement de Mineurs Isolés Étrangers (désormais Mineurs Non Accompagnés).

Ce même mercredi, sur la place Caffo (13003), Le Tamis proposera de réaliser une performance appelé Le Porteur de Parole. Cette activité qui a lieu sur une place publique invite les passants à répondre à une question, affichée par écrit de manière visible. Il s’agira par-là d’interroger les perceptions, représentations et imaginaires des passants, sur les notions d’identité, d’altérité, d’appartenance et de mobilité, de recueillir leurs témoignages et de les mettre en exergue. Il sera mené par les anthropologues Julia Henin et Alessandra Stefani.

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Les identités multiples, individuelles et collectives, structurent les relations, entre les personnes, les groupes et les pays de la Méditerranée. Elles se développent en continu, emportant avec elles ce qu’elles sélectionnent tout au long de leurs parcours. Interroger ce qui nous constitue et prendre conscience de la diversité des univers auxquels nous appartenons, dans le but de favoriser le dialogue, la compréhension mutuelle et d’ouvrir un espace public méditerranéen, voilà les objectifs que se propose de réaliser le projet Identités Méditerranéennes, qui se clôturera le 31 décembre prochain.

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11 octobre 2016 - Sarah - Chroniques sur le guidon

POC 2016 : Le Tamis entre en jeu !

Le dimanche 2 octobre, dans le cadre des POC 2016, une douzaine de bénévoles au long cours et de volontaires de la dernière heure ont permis au grand jeu Tiss-me de prendre vie rue Consolat, à Marseille, entre la Casa Consolat et le Garage Imaginaire.

Tiss-me marquait l’ouverture des ateliers du Tamis qui propose cette année, dans le cadre du projet Correspondances, de chevaucher les imaginaires collectifs liés aux migrations. Chevaucher, c’est à dire explorer et expliciter collectivement les imaginaires sociaux contemporains et analyser les différentes formes d’interactions entre les savoirs et l’imaginaire mobilisés.

le départ

Après avoir amarré leur fil sur la ligne de départ, les passants étaient invités à partir…

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Qu’emporte-t-on quand on part en voyage ? Le choix de l’unique objet, de mémoire pour les uns, de circonstance pour les autres, a suscité une réflexion intense et concertée entre les enfants et leurs parents:

“De l’eau, parce que si on a de l’eau, on peut survivre longtemps.
Après, on meurt.”

“Des photos pour garder mon identité sur la route.
Même si on change son identité pendant un voyage,
c’est important de se souvenir de ses racines.”

“Une piqûre.
C’est mon quatrième voyage, je connais la route.
Je vais piquer les docteurs.”

La menace de piqûre des médecins ambulants a en effet capté l’attention des plus jeunes. Certains ont refait le parcours exprès, un nouvel objet en poche, leur permettant d’y échapper. Avant d’accéder à la ligne de l’Administration Volante Non-identifiée (AVNI), il a fallu réciter l’alphabet à l’envers, passer le contrôle de couleur du fil de laine, ramper, enjamber, démêler…

La tension, l'attention. Photo: Laura Spica.

La tension, l’attention.

Gardes-frontières. Photo: Sarah Toucas.

Gardes-frontières.

Unidentified Flying Administration (UFA). Photo: Alessandra Stefani.

Administration Volante Non Identifiée (AVNI)

Le tissage prend corps.

Qu’est-ce qui se trame?

Tiss-me évoque la route, la traversée des frontières, les contraintes et les rêves, qui poussent à voyager. Libre au joueur de contourner les règles et de les réinterpréter à sa guise.

En contrepoint mélodieux de l’aspect ludique évident, il s’agissait pour nous de réfléchir, par la performance, et de provoquer la rencontre des savoirs et des imaginaires.

En tissant la rue de fils de laine, au gré des passants, on matérialise le voyage, la relation espace-temps et la fabrication des structures. Au fur et à mesure des passages apparaissent les réseaux, les regroupements et les frontières. Aux frontières naturelles viennent s’ajouter les frontières sociales. Le paysage se dessine. S’agit-il de circuler librement ou de suivre un chemin ? L’Autre sauve-t-il, au passage ?

Ce jeu sans pions renvoie également les passants et les joueurs aux personnages clefs que l’on a pris l’habitude d’associer aux migrations : le garde-frontières, le policier, le médecin et l’administrateur. Leur déguisement, caricature parfois grossière, signale l’« anthropo-scène » migratoire, le passage d’une organisation sociale contrainte par les frontières naturelles à une diplomatie de la ségrégation, à laquelle chacun participe en jouant et rejouant son propre rôle. Ainsi, on construit des murs, à travers la plaine.

À la porte du Rêve doré, il faut se séparer de l’objet choisi au départ, matérialisé par un galet. Ici commence la collecte d’objets de restitution qui serviront de support et d’inspiration au Tamis pour la suite de ses Ateliers.

À la fois cocoon et cage, le rêve doré est dual. Il donne à voir le ligament, structure solide, extensible et pourtant déchirable, qui relie l’intériorité à l’extériorité. Le joueur y trouve sans doute un mélange de ce dont il a rêvé et d’autre chose. Nous y avons mis, par exemple, plus de mots bleus que de “choses dorées comme des Ferrero Rochers” (l’imaginaire d’un gourmand?). Tiss-me effleure ainsi, de manière détournée, la notion d’assemblages identitaires et linguistiques, de métissages.

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Le Rêve doré.

Le rêve doré. Photo: Laura Spica.

À l’intérieur du Rêve doré.

À l'intérieur du Rêve doré. Photo: Alessandra Stefani.

À l’intérieur du Rêve doré.

Bilan du voyage

“Tumultueux. Ça a été compliqué, la mer était agitée,
on s’est fait aborder par des pirates…
On a beaucoup, beaucoup attendu… beaucoup attendu !”

“Extrêmement bien. Extrêmement rapide… tout comme je m’attendais.”

“Génial ! Y’a pas mal de gens qui m’embêtent, mais ça va…
ça me fait penser à Jimmy Hendrix.”

“Je m’attendais à plus de rencontres,
mais j’imagine que toutes ces traces sur la route,
c’étaient des gens avant moi, et c’est assez entraînant.”

Deux heures durant, près de quarante joueurs ont vaillamment tissé la trame de laine sur le canevas de l’attente, des contrôles de police et des médecins ambulants. Au gré de leur périple vers le Rêve doré, il se sont pris les pieds, la tête, le corps tout entier dans le tissage multicolore qui ployait et se déployait dans la lumière dorée du soleil couchant. On n’aurait pas pu rêver mieux pour le lancement de nos ateliers !

Le Tamis adresse un immense MERCI à tous les acteurs et confectionneurs pour leur invesTISSeMEnt sans retenue et leur générosité !

Nous remercions chaleureusement l’équipe du café associatif Manifesten, qui nous a ouvert ses portes pendant un mois pour la préparation du jeu, ainsi que la Casa Consolat et le Garage imaginaire, qui nous ont offert un espace de jeu !

Images : Alessandra Stefani, Laura Spica, Sarah Toucas