5 décembre 2016 - Ulysse - Chroniques sur le guidon

Un Atelier très relevé !

Déclic : Petit mécanisme de déclenchement qui, actionné, détermine le fonctionnement ou l’arrêt d’un appareil. Faire jouer un déclic. (CNRTL)

Vendredi 18 novembre, Centre Régional d’Information Jeunesse Provence-Alpes, Marseille Canebière. Le décor est planté pour un atelier Déclic’ organisé par le RadioLab, le labo-média intergalactique de Radio Grenouille destiné à mettre en réseau des médias jeunes et étudiants de la région. Invité à venir exposer un projet de média, le Tamis a répondu présent à l’appel et s’est rendu sur place pour profiter de l’avis de « personnes ressources » triées sur le volet, dont l’expérience dans l’animation et la gestion de médias écrits, filmés ou encore sonores n’est plus à démontrer.

Présentation Dynam'hit

Un projet sur la comète ?

Si le Tamis n’est pas à proprement parler un média et que le collectif met en question les limites de la « jeunesse », tant d’un point de vue conceptuel qu’empirique (nous tentons encore de compter nos cheveux blancs), l’atelier Déclic’ s’est révélé être un excellent espace pour tester un projet un peu particulier. Il s’agit d’une plateforme multimédia interactive, conçue comme matrice de réalisation et support de valorisation des Chevauchées de nos imaginaires collectifs, dont le premier volet est placé sous le signe des Correspondances. Cette plateforme, inspirée par la narration « transmédia » (web-documentaires etc.), proposerait au téléchargement des ateliers (ou expériences), créant la possibilité, pour les participants, de produire et de mettre en ligne des contenus multiformes fédérés par une thématique commune. La plateforme verrait ainsi se constituer une enquête multi-située sur nos imaginaires collectifs et proposerait aux visiteurs la restitution au long-cours des résultats construits par les participants. Projet sur la comète ? Ptet ben qu’oui, ptet ben qu’non !

Table_Travail

L’atelier Déclic’ auquel nous avons participé nous a permis de mettre à plat les enjeux de ce projet ambitieux et stimulant, d’en dresser quelques lignes de fuite et d’esquisser des réponses aux grandes questions que la mise en place d’une telle plateforme pose.

Déroulement

Les ateliers Déclic’ sont avant tout des rencontres entre des porteurs de projets et des personnes ressources pour les guider sur des problématiques rencontrées au fil de l’eau. L’enjeu de ces ateliers, au-delà de trouver des solutions concrètes à des difficultés, est de créer des passerelles entre professionnels et novices en matière de médias. La transmission et le partage des expériences est une démarche qui fait écho aux principes du Tamis aussi deux de ses membres se sont rendus sur place avec entrain, animés par un sentiment de curiosité et d’excitation lié à l’inédit de l’aventure.

Après une courte introduction et quelques exercices pour briser la glace résiduelle entre les participants, les duos projets/ressources se sont formés pour entamer les discussions. Le Tamis a eu la chance de travailler avec Benoît Ferrier, directeur chez Tabasco Vidéo, une association de développement de projets audiovisuels installée dans le quartier de la Joliette. Après avoir fait connaissance, évoqué ce qui nous meut, raconté des bribes de nos histoires,Benoît nous a présenté des projets développés par Tabasco Vidéo et ses partenaires. Ces projets combinant art et sciences sociales, enquête et restitution, expériences sensibles et voyages connectées, se sont révélés très ressemblants à celui de la plateforme des Chevauchées. Et puisque les premiers existent bel et bien, ils ont rendu le dernier possible, évident et presque tangible. Nous retenons entre autres le Fatch, un journal transmédia qui n’en est pas moins qu’à son huitième numéro, mais aussi des balades authentiques et connectées : les Héros de Marseille.

Une belle affaire !

L’idée d’un média participatif est restée au cœur de la discussion entre le Tamis et Tabasco Vidéo pour finalement aboutir à une ébauche de plan de la plateforme multimédia des Chevauchées. Sans se laisser endormir, Benoît Ferrier a écouté nos paroles, nos envolées sur les Chevauchées et a pris notre projet au sérieux tout en acceptant sa part d’imaginaire. Il nous a apporté du grain à moudre et nous avons pu, ensemble, étudier sa faisabilité (recrutements, formations, subventions). Le Tamis a ainsi eu l’opportunité de discuter des limites et des dangers que représente un grand projet pour une petite structure, sans détruire le désir de le mener à bien. Chapeau bas pour Benoît !

Workshop_Declic

Le Tamis remercie aussi RadioLab pour l’invitation à cet atelier Déclic’ ainsi que tous les participants dont nous avons soigneusement recueilli tous les avis et commentaires. Nous espérons que cet atelier, une grande première, aboutira à d’autres projets collaboratifs stimulants.

Mikaëla Le Meur & Ulysse Ménard.

15 novembre 2016 - Julia - Chroniques sur le guidon

En quête d’identités Méditerranéennes

« Ce n’est pas parce que les identités-relations sont ouvertes qu’elles ne sont pas enracinées. Mais la racine n’est plus une fiche, elle ne tue plus autour d’elle, elle trace, à la rencontre d’autres racines avec qui elle partage le suc de la terre.» (E. Glissant)

racines

Depuis mai 2016, l’association coopérative Le Tamis se charge de la coordination du projet Identités Méditerranéennes. Ce projet, dont le sous-titre est « Respect des identités multiples dans l’espace public Méditerranéen : regards croisés Nord-Sud sur le sexisme et le racisme », a été lancé en 2014 par le Laboratoire d’Idées Bureau d’Etude Recherche – LIBER – Prospective et Coopération.

Situé entre Marseille et Casablanca, le projet vise à créer des passerelles entre des acteurs aux parcours et bagages contrastés sur chacun des deux territoires et entre les deux rives de la Méditerranée. L’enjeu est de permettre à des lycéens et des étudiants de s’approprier les outils du débat et de la réflexion, en leur proposant, durant une année, de participer à un cycle de sensibilisations et d’actions concernant l’impact des discriminations racistes et sexistes sur la construction d’une citoyenneté méditerranéenne et d’un espace public commun. À travers des regards croisés, ils appréhendent la façon dont les identités individuelles se construisent par empilement et par appartenances à des sphères qui varient tout au long de leur parcours de vie.
« Vous sentez-vous Méditerranéen ? »

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Projection de documentaire à la Villa Méditerranée

Dans leur documentaire « En quête d’Identités Méditerranéennes », les lycéens de la classe de 2nde 1 du lycée Artaud (13013), en collaboration avec l’association Les têtes de l’art, ont parcouru les rues de Marseille, caméra au poing, interrogeant plusieurs interlocuteurs sur leurs perceptions de la notion d’identité en Méditerranée. Du conservateur du Musée d’histoire de Marseille, à la vendeuse de poisson sur le Vieux-Port, en passant par les élèves eux-mêmes, les témoignages ont été recueillis sur les questions identitaires en Méditerranée. « Avant, quand on me disait Méditerranée, je pensais à la mer, au soleil… je pensais pas aux autres villes » confie l’une des jeunes filles.

« Tous différents ? »

De leurs côté, les étudiant.e.s du Master L.E.A d’Aix-en-Provence, ont mobilisé des adolescent.e.s de la cité Airbel (13011) en collaboration avec l’association AFEV, ainsi qu’une classe de CE1 de l’école Jean Moulin II à Sénas (13560). Le cycle de sensibilisation et de réflexions, axé sur les discriminations, s’est étalé sur plusieurs mois et a donné lieu à la réalisation du documentaire « Tous Méditerriens ».

« Mon appartenance physique me joue des tours. Mon appartenance ethnique me joue des tours. Mon appartenance religieuse me joue des tours. Suis-je condamnée pour toujours ? ». C’est à l’occasion d’un concours de poèmes, proposé par l’AFEV que des participantes inspirées ont écrit plusieurs textes exprimant leurs ressentis au sujet des discriminations sexistes et racistes dont elles font l’expérience banale et quotidienne. Arrangés et mis en musique, ces textes ont été rappés lors d’un évènement organisé par les étudiant.e.s du Master L.E.A à la Villa Méditerranée le 25 juin dernier.

Regards croisés Nord-Sud

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Le projet s’étend de l’autre côté de la Méditerranée où les bénévoles de l’association Initiative Urbaine impulsent des actions. Cette association de quartier, implantée dans la commune de Hay Mohammedi, à Casablanca, offre aux jeunes un espace d’épanouissement personnel, de soutien scolaire et d’expression citoyenne. Les collégiens s’y rendent pour suivre des cours de soutien scolaire, puis les années passant, ils deviennent volontaires et finissent à leur tour par donner la classe pour leurs cadets. Se saisissant depuis quelques semaines seulement du projet Identités Méditerranéennes, l’association est actuellement en train de mettre au point des opérations visant à interroger les impacts des discriminations sexistes et racistes dans leur quartier et dans leur ville. Micros-trottoirs, tables rondes et concours de slam, entre autres initiatives, seront bientôt à l’œuvre dans les rues de Casablanca.

Semaine de la Solidarité Internationale

À Marseille, Le Tamis organise cette semaine, dans le cadre de la Semaine de la Solidarité Internationale, des ateliers portant sur l’identité. En lien avec les Chevauchées du Tamis, ces ateliers invitent à explorer collectivement les imaginaires sociaux et à analyser les formes d’interactions entre les savoirs et l’imaginaire mobilisé. Ces mercredi 16 et jeudi 17 novembre 2016, deux intervenantes artistes et anthropologues, Annalisa Lollo et Laura Spica mèneront auprès d’un groupe de jeunes résident.e.s du foyer de jeunes travailleurs AAJT son atelier Muse-Me. Conçu comme un atelier de création artistique, il invite les participants à réaliser des portraits croisés, grâce à des collages faits à partir de matériaux divers. La superposition des images et motifs évoque la construction de l’identité à travers le temps et l’espace. Le groupe de participants se compose essentiellement de Mineurs Isolés Étrangers (désormais Mineurs Non Accompagnés).

Ce même mercredi, sur la place Caffo (13003), Le Tamis proposera de réaliser une performance appelé Le Porteur de Parole. Cette activité qui a lieu sur une place publique invite les passants à répondre à une question, affichée par écrit de manière visible. Il s’agira par-là d’interroger les perceptions, représentations et imaginaires des passants, sur les notions d’identité, d’altérité, d’appartenance et de mobilité, de recueillir leurs témoignages et de les mettre en exergue. Il sera mené par les anthropologues Julia Henin et Alessandra Stefani.

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Les identités multiples, individuelles et collectives, structurent les relations, entre les personnes, les groupes et les pays de la Méditerranée. Elles se développent en continu, emportant avec elles ce qu’elles sélectionnent tout au long de leurs parcours. Interroger ce qui nous constitue et prendre conscience de la diversité des univers auxquels nous appartenons, dans le but de favoriser le dialogue, la compréhension mutuelle et d’ouvrir un espace public méditerranéen, voilà les objectifs que se propose de réaliser le projet Identités Méditerranéennes, qui se clôturera le 31 décembre prochain.

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11 octobre 2016 - Sarah - Chroniques sur le guidon

POC 2016 : Le Tamis entre en jeu !

Le dimanche 2 octobre, dans le cadre des POC 2016, une douzaine de bénévoles au long cours et de volontaires de la dernière heure ont permis au grand jeu Tiss-me de prendre vie rue Consolat, à Marseille, entre la Casa Consolat et le Garage Imaginaire.

Tiss-me marquait l’ouverture des ateliers du Tamis qui propose cette année, dans le cadre du projet Correspondances, de chevaucher les imaginaires collectifs liés aux migrations. Chevaucher, c’est à dire explorer et expliciter collectivement les imaginaires sociaux contemporains et analyser les différentes formes d’interactions entre les savoirs et l’imaginaire mobilisés.

le départ

Après avoir amarré leur fil sur la ligne de départ, les passants étaient invités à partir…

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Qu’emporte-t-on quand on part en voyage ? Le choix de l’unique objet, de mémoire pour les uns, de circonstance pour les autres, a suscité une réflexion intense et concertée entre les enfants et leurs parents:

“De l’eau, parce que si on a de l’eau, on peut survivre longtemps.
Après, on meurt.”

“Des photos pour garder mon identité sur la route.
Même si on change son identité pendant un voyage,
c’est important de se souvenir de ses racines.”

“Une piqûre.
C’est mon quatrième voyage, je connais la route.
Je vais piquer les docteurs.”

La menace de piqûre des médecins ambulants a en effet capté l’attention des plus jeunes. Certains ont refait le parcours exprès, un nouvel objet en poche, leur permettant d’y échapper. Avant d’accéder à la ligne de l’Administration Volante Non-identifiée (AVNI), il a fallu réciter l’alphabet à l’envers, passer le contrôle de couleur du fil de laine, ramper, enjamber, démêler…

La tension, l'attention. Photo: Laura Spica.

La tension, l’attention.

Gardes-frontières. Photo: Sarah Toucas.

Gardes-frontières.

Unidentified Flying Administration (UFA). Photo: Alessandra Stefani.

Administration Volante Non Identifiée (AVNI)

Le tissage prend corps.

Qu’est-ce qui se trame?

Tiss-me évoque la route, la traversée des frontières, les contraintes et les rêves, qui poussent à voyager. Libre au joueur de contourner les règles et de les réinterpréter à sa guise.

En contrepoint mélodieux de l’aspect ludique évident, il s’agissait pour nous de réfléchir, par la performance, et de provoquer la rencontre des savoirs et des imaginaires.

En tissant la rue de fils de laine, au gré des passants, on matérialise le voyage, la relation espace-temps et la fabrication des structures. Au fur et à mesure des passages apparaissent les réseaux, les regroupements et les frontières. Aux frontières naturelles viennent s’ajouter les frontières sociales. Le paysage se dessine. S’agit-il de circuler librement ou de suivre un chemin ? L’Autre sauve-t-il, au passage ?

Ce jeu sans pions renvoie également les passants et les joueurs aux personnages clefs que l’on a pris l’habitude d’associer aux migrations : le garde-frontières, le policier, le médecin et l’administrateur. Leur déguisement, caricature parfois grossière, signale l’« anthropo-scène » migratoire, le passage d’une organisation sociale contrainte par les frontières naturelles à une diplomatie de la ségrégation, à laquelle chacun participe en jouant et rejouant son propre rôle. Ainsi, on construit des murs, à travers la plaine.

À la porte du Rêve doré, il faut se séparer de l’objet choisi au départ, matérialisé par un galet. Ici commence la collecte d’objets de restitution qui serviront de support et d’inspiration au Tamis pour la suite de ses Ateliers.

À la fois cocoon et cage, le rêve doré est dual. Il donne à voir le ligament, structure solide, extensible et pourtant déchirable, qui relie l’intériorité à l’extériorité. Le joueur y trouve sans doute un mélange de ce dont il a rêvé et d’autre chose. Nous y avons mis, par exemple, plus de mots bleus que de “choses dorées comme des Ferrero Rochers” (l’imaginaire d’un gourmand?). Tiss-me effleure ainsi, de manière détournée, la notion d’assemblages identitaires et linguistiques, de métissages.

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Le Rêve doré.

Le rêve doré. Photo: Laura Spica.

À l’intérieur du Rêve doré.

À l'intérieur du Rêve doré. Photo: Alessandra Stefani.

À l’intérieur du Rêve doré.

Bilan du voyage

“Tumultueux. Ça a été compliqué, la mer était agitée,
on s’est fait aborder par des pirates…
On a beaucoup, beaucoup attendu… beaucoup attendu !”

“Extrêmement bien. Extrêmement rapide… tout comme je m’attendais.”

“Génial ! Y’a pas mal de gens qui m’embêtent, mais ça va…
ça me fait penser à Jimmy Hendrix.”

“Je m’attendais à plus de rencontres,
mais j’imagine que toutes ces traces sur la route,
c’étaient des gens avant moi, et c’est assez entraînant.”

Deux heures durant, près de quarante joueurs ont vaillamment tissé la trame de laine sur le canevas de l’attente, des contrôles de police et des médecins ambulants. Au gré de leur périple vers le Rêve doré, il se sont pris les pieds, la tête, le corps tout entier dans le tissage multicolore qui ployait et se déployait dans la lumière dorée du soleil couchant. On n’aurait pas pu rêver mieux pour le lancement de nos ateliers !

Le Tamis adresse un immense MERCI à tous les acteurs et confectionneurs pour leur invesTISSeMEnt sans retenue et leur générosité !

Nous remercions chaleureusement l’équipe du café associatif Manifesten, qui nous a ouvert ses portes pendant un mois pour la préparation du jeu, ainsi que la Casa Consolat et le Garage imaginaire, qui nous ont offert un espace de jeu !

Images : Alessandra Stefani, Laura Spica, Sarah Toucas

19 septembre 2016 - Sarah - Chroniques sur le guidon

T’as mis tes rubans?

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En septembre, à l’occasion de la 11ème édition du Festival POC, le Tamis prépare TISS-ME, un jeu/performance filmé qui investira la rue Consolat à Marseille, le dimanche 2 octobre 2016, de 16h à 18h.

TISS-ME est un jeu dans lequel les règles ne sont pas figées. Les passants tissent la rue de fils de laine au gré de panneaux, qu’ils suivent ou détournent. En jouant avec les frontières, on se demande comment elles sont fabriquées, comment, éventuellement, les repenser. Où est l’Ici, où est l’Ailleurs et quel voyage les relie? Au bout de la route, le Rêve doré, passage intérieur, métissé.

L’atelier de fabrication du jeu est hébergé gracieusement et chaleureusement par le Manifesten. Il a lieu tous les mercredi, de 17h à 19h. C’est l’occasion pour nous de travailler avec un ensemble d’électrons libres, comédiens, tisserand, activistes et musiciens, qui gravitent autour du Tamis. Les portes du Manifesten sont ouvertes et les tables à rallonges, si l’envie vous prenait de vous dégourdir les doigts!

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Ateliers fabrication et Rendez-vous des acteurs, tous les mercredi du mois de septembre au Manifesten à Marseille, de 17h à 19h.

Le mercredi, 21 septembre 2016, le Rendez-vous des acteurs du jeu se déroulera à la Casa Consolat, 1 rue Consolat à Marseille.

Festival POC 2016 – du 30 septembre au 02 octobre.

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16 septembre 2016 - Mikaëla - Chroniques sur le guidon

Nous nous attelons, vous vous ateliers, ils s’attelleront… de requin.

Si l’année 2016 du Tamis est placée sous le signe des Correspondances, il nous incombe en cette rentrée d’en relever quelques-unes qui jalonnent nos activités du passé, du présent et du futur. L’idée est simple  : il s’agit de saisir la plume pour relier des points esseulés dans nos mémoires individuelles et de voir, au fil du trait, ce que cela produira de joli dessein collectif. À nous donc de tisser notre récit associatif en reliant les expériences éparses, pourtant toutes portées, au fond, par la même intention : Ce qui nous meut.

correspondances et constellations

Vue d’artiste de la constellation de la Grande Ourse, l’une des constellations les plus connues de l’hémisphère nord. Sidney Hall – 1825

 

La cartographie imaginaire qu’il est question d’esquisser ici concerne la place du mot “atelier” dans notre langage commun et nos activités. Entendons-nous tout de suite, aujourd’hui, nous serons loin d’épuiser la réflexion sur le vaste sujet des ateliers, lui-même imbriqué dans une constellation de concepts tout aussi passionnants (et parfois effrayants) à penser comme la transmission, l’expérimentation, l’apprentissage, la connaissance, le savoir etc. Ce billet entend simplement pointer du doigt la prolifération du mot “atelier” dans notre langue et notre pratique associative, celui-ci recouvrant diverses expériences déjà vécues et encore à vivre. En mettant en correspondance les occurrences du mot “atelier”, nous n’aurons pas répondu à toutes les questions que ce terme soulève. Une partie d’entre elles pourront cependant être identifiées et l’exercice de cartographie aura, espérons-le, donné à voir en quelques touches de couleur ce qui nous plaît dans l’usage de ce mot et ce qu’il contient lorsque nous l’employons.

Grand inventaire des ateliers

Au Tamis, nous avons de nombreux ateliers, qui prennent des formes multiples. Il convient d’en détailler quelques- uns des plus marquants :

Les membres du Tamis se réunissent régulièrement lors d’Ateliers Tables Basses. Ces rencontres physiques et mentales, autour de tables pas toujours basses mais ô combien accueillantes, sont structurées par la lecture de textes des sciences humaines et sociales choisis pour leur capacité à éclairer  et orienter l’action collective. Chaque atelier est ouvert aux électrons gravitant autour du Tamis et il est animé par les référents du collège Sciences et Techniques de l’association dans l’optique de réfléchir aux projets menés à travers un regard à la fois distancié et impliqué. Les discussions se déroulant durant les Ateliers Tables Basses sont retranscrites et retravaillées pour produire des textes-outils de réflexions et de pilotage, bases, parmi d’autres, de construction d’un socle associatif commun.

L’atelier du Tamis est un blog scientifique hébergé sur la plateforme Hypotheses.org, qui propose à des institutions universitaires et de recherche de tenir des carnets de route de leurs activités. Nous avons créé cet outil en ligne pour y travailler notre langue, nos concepts, nos intertextualités et nos outils réflexifs, en y développant un fort ancrage dans les sciences humaines et sociales. En plus de ce lien organique avec le milieu scientifique, les rédacteurs de l’atelier du Tamis travaillent la forme autant que le fond en explorant des manières multimédia d’exprimer les savoirs et de forger les outils conceptuels de l’association.

Au-delà de ces activités de réflexion et de production d’outils associatifs, Le Tamis développe un catalogue d’ateliers qui sont autant d’interventions auprès de publics variés, notamment scolaires. Initiés aux savoir-faire combinés des arts et des sciences sociales, les participants sont invités à apprendre par l’expérience de l’enquête, à travailler et produire collectivement et à mettre le monde en récits. Premiers du nom, les ateliers d’initiation aux regards anthropologique et cinématographique, ont rassemblé des enfants de la métropole marseillaise autour d’une enquête à la découverte de l’initiative Yes we camp. Travaillée à travers le prisme de l’image, cette enquête en plusieurs volets a permis aux enfants de s’approprier certains codes de la narration visuelle et des méthodologies de travail en sciences sociales.

“L’âge des découvertes”, un atelier réalisé au sein du collège Victor Hugo de la ville de Chartres durant l’hiver 2015 a quant à lui proposé à des élèves de 5ème de construire une carte imaginaire de leur établissement à partir d’une enquête de terrain miniature, durant trois journées consécutives. Entre dessin d’observation  et représentation imaginaire, la fresque du collège s’est progressivement constituée à partir d’entretiens réalisés par des petits  groupes d’élèves  avec les différents habitants des lieux, adultes comme enfants, via une traduction en images orchestrée par Florent Grouazel, auteur de bandes dessinées. Cette enquête collective a permis de récolter différents points de vue sur le collège et de laisser place à la multitude des récits. Le montage visuel et sonore ci-dessous en retrace l’expérience :

Les ateliers conçus par le Tamis pour des publics extérieurs à l’association se fédèrent depuis cette année autour d’une thématique commune, sous l’impulsion du projet Correspondances. Correspondances, sous-titré « Objets et mémoires en circulation  », propose d’interroger notre rapport au mouvement, au voyage, aux identités multiples, à l’altérité et au vivre-ensemble. Le lancement du projet aura lieu le 2 octobre prochain par une performance exceptionnelle d’un des ateliers conçus dans le cadre du projet : TISS-ME.

Le Tamis entend développer et élargir son répertoire d’ateliers en concevant une plateforme multimédia en ligne répertoriant des feuilles de routes d’ateliers à la fois simples  à mettre en œuvre et riches de réflexions, visant à aiguiller la réalisation d’expérimentations combinant démarches scientifiques et artistiques. Il s’agit de proposer des outils appropriables par tout un chacun, avec ou sans l’aide des intervenants du Tamis, et suivant une grande thématique renouvelée tous les 2 ans. Ce vaste chantier est au cœur de nos réflexions actuelles et de nos projets futurs, aussi arrêtons là le dévoilement de l’avenir. Nous y reviendrons.

point d’ancrage lexical

Pourquoi faire cet usage pléthorique du mot “atelier” ? Qu’est-ce qui nous attire tant dans ce terme ? Sommes-nous des victimes insouciantes de cette novlangue décrite par Frank Lepage et contaminant l’univers associatif et culturel à coup de mot-valise impensés mais séduisants ? Que mettons-nous dans nos mots ? Que veulent-ils dire ? Que voulons nous dire ?  Cette réflexion sur le langage est capitale pour le Tamis et nous prenons soin de peser nos mots. Ils nous questionnent et nous les questionnons.

Devant le vertige provoqué par le doute et les questions en pagaille, la lecture d’un dictionnaire démodé, parfois un peu périmé, mais aussi drôle et très souvent lumineux, peut nous remettre d’aplomb. Rien de tel que la prose XIXème d’Émile Littré pour faire refleurir notre langue de semences anciennes mais robustes  et ainsi trouver un point d’ancrage :

«

atelier

(a-te-lié) s. m.

1. Lieu où travaillent un certain nombre d’ouvriers.

En le promenant d’atelier en atelier, [Rousseau, Ém. III]

Il se promène tous les jours dans ses ateliers, [La Bruyère, 11]

Tous les ouvriers d’un atelier. L’atelier demande une augmentation de salaire. Un chef d’atelier.

2. Lieu de travail d’un peintre, d’un sculpteur. Cet artiste ne se plaît que dans son atelier.

L’atelier, les élèves d’un artiste considérés collectivement.

Jour d’atelier, jour le plus propre à éclairer un tableau, une statue.

3. En termes de fortification, excavation de fossé.

Entendre bien l’atelier, être habile à conduire les travaux d’attaque et de défense d’une place.

4. Atelier du sculpteur, nom de petites constellations du ciel méridional.  »

Dans ce dictionnaire poussiéreux, qu’avons-nous sous les yeux ? L’essentiel des ingrédients qui font que nous aimons et que nous promouvons les ateliers : un savoureux mélange de travail et de créativité, entre artisanat et art ; un lieu habité par un collectif d’ouvriers et d’artistes, où l’on se plait surtout si l’on a été augmenté ; des temps choisis pour leurs vertus éclairantes ; une place où nous forgeons nos armes et nous apprenons à nous défendre ; et même une constellation méridionale, Apparatus Sculptoris, limitrophe de celle de la grue et du fourneau. Quoi de plus lumineux pour une association marseillaise ? Promenons-nous donc d’atelier en atelier, à la recherche de leurs correspondances !

Note pour plus tard : s’atteler à approfondir la question de la pédagogie. Ou encore celles de l’apprentissage et de la transmission, parce qu’elles s’accordent au diapason que nous nous sommes donné et à notre horizon d’horizontalité.